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La « Nouvelle Question Jurassienne » : penser le Jura autrement

Par Jean-Claude Rennwald, conseiller national (PS/JU), vice-président de l’USS

En 1994, le Conseil fédéral, les gouvernements jurassien et bernois décidaient d’institutionnaliser le dialogue interjurassien pour chercher à résoudre le conflit jurassien. Ainsi naissait l’Assemble interjurassienne (AIJ), qui regroupe des représentant-e-s du canton du Jura et du Jura Bernois. Onze ans plus tard, en septembre 2005, celle-ci commence enfin le travail concret : elle a reçu le mandat (de la part du Conseil fédéral, des cantons du Jura et de Berne) d’étudier:

  1. la création d’une nouvelle entité politique réunissant le Canton du Jura et le Jura bernois ;
  2. les institutions interjurassiennes et le statut particulier du Jura bernois (2003) ;
  3.  « d’autres pistes.

Les travaux ont commencé et les résultats des différentes commissions sont très attendus, d’ici deux ans. Que penser de ces trois pistes ?

L’étape interjurassienne

Le statut particulier du Jura bernois, deuxième piste du mandat, n’est pas une solution satisfaisante pour cette région. Les député-e-s de la région au Grand Conseil bernois sont proportionnellement peu nombreux ; le Conseil du Jura bernois a des compétences limitées (domaine culturel surcout). Quant aux institutions interjurassiennes, si elles sont nécessaires (pour des raisons de masse critique et financières), elles ne peuvent constituer qu’une étape intermédiaire vers l’abolition de la frontière cantonale entre le Jura et le Jura bernois.

Quant à la troisième piste évoquée, elle a pour avantage d’ouvrir la réflexion, mais les forces limitées de l’AIJ et le délai court qui lui est imparti font craindre que cela n’aboutisse à rien de concret. Il faut certes se demander si l’avenir du Jura n’est pas dans un espace plus large : Supercanton de l’Arc Jurassien (canton du Jura, Jura bernois et canton de Neuchâtel), régions transfrontalières, etc. Toutefois, viser (trop) haut est souvent la solution pour que rien ne bouge… avant longtemps.

Je reste convaincu qu’il faut privilégier la création d’un canton à 6 districts[1], c’est-à-dire la piste une du mandat de l’AIJ. Elle reprend l’initiative « Un seul Jura » déposée par le Mouvement autonomiste jurassien en 2003 et le rapport de la Commission Widmer, où quatre conseillers d’Etat romands proposaient, en 1993, ni plus ni moins que de réconcilier les deux parties du Jura par la création d’un nouveau canton dans un délai de sept ans…

Nouveau canton, canton nouveau

La volonté de réunir le Jura ne correspond toutefois pas à un « remake » de la Question jurassienne des années 70. Le problème reste certes politique, mais il se pose aussi dans d’autres termes : comment donner à la région jurassienne un maximum de chances pour résister aux mutations économiques actuelles, par exemple le démantèlement industriel, et de faire valoir ses atouts sur les scènes nationale et internationale ? C’est cette question qui permettra, par ailleurs, d’intéresser les jeunes et les nouveaux habitant-e-s - qui n’ont pas connu l’effervescence du passé : pour eux, la Question jurassienne ne peut avoir un sens que si elle participe au dynamisme économique, social et culturel de la région jurassienne. On peut aussi rêver que, à nouveau, les espoirs de créer un Etat « nouveau », avec de nouveaux droits et de meilleures conditions de vie pour les étrangers/ères, les femmes, les travailleurs/euses, les familles, etc. mobilisent la population.

Le Jura bernois se sent isolé et négligé dans le grand canton de Berne. Je Jura souffre de sa petitesse. Réunis, ils pourraient avoir une taille critique intéressante pour travailler de manière autonome à leur développement. Pendant longtemps, les Jurassien-ne-s du canton du Jura ont pensé qu’il leur suffirait d’accueillir à bras ouverts les concitoyen-ne-s du Jura resté bernois qui le désiraient. Rien n’est plus faux : un nouveau canton doit naître d’un réel partage de souveraineté, du pouvoir et des compétences entre les deux régions. Sur le terrain, cela signifie que le Canton du Jura, ses responsables, ses partis politiques, ses institutions devront renoncer à certaines de leurs prérogatives. Le paysage des hôpitaux, des écoles, le paysage politique, le choix de la capitale cantonale, tout sera repensé et chamboulé. Il est par exemple clair que le parti démocrate-chrétien perdra l’hégémonie qui est la sienne dans le canton du Jura, au profit des partis socialiste et radicaux. De plus, les Jurassien-ne-s doivent faire un bilan critique de leur canton, pour admettre qu’il n’a pas su mettre en place des projets susceptibles de le rendre suffisamment attractif.

Le Jura historique est à un tournant de son histoire. Dans un avenir relativement proche, il sera possible de répondre à cette question centrale : L’Assemblée interjurassienne aura-t-elle su relever le défi consistant à jeter les bases d’un nouvel ensemble politique, original et audacieux, capable de rassembler citoyennes et citoyens des deux parties du Jura francophone, de mieux faire entendre sa voix sur la scène fédérale et de s’intégrer dans l’Europe des régions ? Cela dépendra de l’engagement et de l’enthousiasme des membres de l’AIJ, mais davantage encore de la mobilisation des populations concernées. Or, force est d’admettre que jusqu’ici, l’AIJ a travaillé en vase clos. La capacité de l’AIJ à régler définitivement la Question jurassienne passe notamment par une remise en cause fondamentale de cette pratique.


[1] Jean-Claude Rennwald, Nord-Sud : le partage, Courrendlin, CJE Communication, 1995.

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Jean-Claude Rennwald - conseiller national
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E-mail : rennwald@bluewin.ch - Internet : http://www.rennwald.ch
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