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Pourquoi je ne serai pas candidat au Gouvernement jurassien

Chères et chers camarades,

Depuis que Claude Hêche a annoncé sa décision de ne plus se représenter au Gouvernement jurassien, j’ai été contacté par des camarades, mais aussi par des collègues syndicalistes et par des amis, pour que je me porte candidat à la charge de ministre. J’ai été très sensible à ces appels, dans lesquels je vois avant tout une reconnaissance du travail que j’effectue depuis plus de dix ans à la tête de l’Union syndicale suisse (USS), du syndicat FTMH et maintenant d’Unia, ainsi qu’au Conseil national.

Après avoir consulté ma famille, de nombreux camarades - du PSJ comme des autres partis de gauche –, collègues et connaissances, dans le Jura comme au Parlement fédéral, j’ai toutefois définitivement décidé de ne pas me porter candidat à la candidature dans la perspective de notre congrès du 16 juin prochain.

Dans la mesure où ce choix personnel a des incidences collectives et pourrait surprendre certains, j’ai décidé de l’expliquer de manière détaillée.

En fait, avant des décisions de cette importance, je me pose une seule question fondamentale : Où suis-je et où serai-je le plus utile aux travailleurs et aux travailleuses ? Pour moi, la réponse ne fait aucun doute : au sein du mouvement syndical et au Parlement fédéral. Ce choix repose sur les cinq considérations suivantes :

  1. L’art de gouverner est difficile à pratiquer s’il n’existe pas de majorité claire, si possible au double niveau de l’exécutif et du législatif. Or, une double majorité de gauche n’est pour l’instant pas envisageable dans le Canton du Jura, même si un gain de deux à trois sièges au Parlement me paraît être un objectif réaliste. Je ne vois pas non plus se dessiner la perspective d’un véritable contrat minimum de législature ayant une orientation de centre-gauche, tant il est vrai que le soi-disant gouvernement de centre-gauche annoncé par les médias au soir des élections cantonales de 2002 n’a jamais existé. Avec tout le respect que j’ai pour mes camarades socialistes qui travaillent dans de telles conditions, je considère – à titre personnel – que la collégialité requise par la présence dans un organe exécutif de cette configuration exigerait de moi des entorses à mes convictions politiques et syndicales que je ne souhaite pas faire.
     

  1. Mon expérience de responsable syndical et de parlementaire fédéral m’a montré qu’en l’espace de dix ans, j’avais apporté – avec d’autres bien sûr ! - beaucoup de choses au monde du travail par la voie syndicale. Pour ne prendre que l’exemple de l’industrie horlogère, branche dont j’assume la responsabilité au sein d’Unia, les progrès accomplis lors des trois derniers renouvellements de la convention collective de travail (CCT), que j’ai dirigés, sont conséquents : passage de 4 1/2 à 5 semaines de vacances pour tous, de 5 1/2 à 6 semaines dès 50 ans ; possibilité de prendre sa retraite une année avant l’âge légal grâce à une rente-pont AVS financée exclusivement par les employeurs ; augmentation substantielle de la participation patronale aux frais de caisse maladie; congé de maternité porté de 14 à 16 semaines et payé à 100 % ; règles visant à prévenir le harcèlement sexuel et le harcèlement moral et professionnel ; congé de formation payé de 3 jours par année ; mesures visant à réguler le travail temporaire. Preuve que je n’oublie pas notre canton, ces réformes ont profité et profitent à des milliers de travailleurs jurassiens, puisque l’horlogerie est l’une des principales composantes de notre tissu industriel. Dans d’autres secteurs, jamais les travailleurs de la construction n’auraient par exemple obtenu la retraite à 60 ans sans la très forte capacité de mobilisation du SIB, l’un des syndicats fondateurs d’Unia. A cela s’ajoute le rôle déterminant joué par l’Union syndicale suisse (USS) dans certaines votations populaires. Je pense, par exemple, au rejet de la loi sur le marché de l’électricité (LME) en 2002 ou au refus de la 11e révision de l’AVS et du paquet fiscal en 2004. Enfin, avec la collaboration de Serge Baehler, son actuel rédacteur en chef, j’ai pris l’initiative de créer « L’Evénement syndical », journal syndical interprofessionnel au rôle irremplaçable et distribué aujourd’hui à 80'000 exemplaires, ce qui en fait l’un des plus importants tirages de la presse romande.
     

  1. Ceci dit, je n’ai jamais opposé le syndical au politique, car comme l’explique si bien mon camarade et ami Raymond Forni, ancien président (PS) de l’Assemblée nationale française : « Le rapport du politique et du syndical ne doit être posé ni en termes d’allégeance, ni en termes d’opposition mais bien de complémentarité. » D’ailleurs, j’ai toujours considéré que la gauche devait être capable de combiner conquête de l’appareil d’Etat, luttes syndicales et développement des mouvements sociaux, dans la mesure où l’Etat n’est pas qu’un instrument de répression, mais qu’il peut aussi être un agent de transformation sociale, économique et culturelle. En 1936, le Front populaire a impulsé des réformes essentielles (congés payés, semaine de 40 heures, etc.), mais celles-ci n’auraient probablement pas vu le jour sans les millions de grévistes qui occupaient une quantité d’usines dans toute la France. A l’inverse, ce puissant mouvement social n’aurait peut-être pas eu autant de succès s’il n’avait pas disposé de relais politiques solides. En Suède, des décennies de gouvernement social-démocrate ont contribué à faire de ce pays l’un des plus généreux sur le plan social. Mais cela a aussi été possible parce que les syndicats de ce pays sont très bien organisés et parce que la Suède connaît l’un des taux de syndicalisation les plus élevés (80 %) de la planète.
     

  1. Personnellement, j’ai pu vérifier cette nécessaire articulation du politique et du syndical à de nombreuses reprises, et plus particulièrement à travers le rôle que j’ai joué dans la mise en place du programme de relance de l’économie de 1997, dans les luttes victorieuses contre les « réformes » de la loi sur le travail (1996) et de l’assurance-chômage (1997), de la 11e révision de l’AVS (2004), dans l’élaboration des mesures d’accompagnement I et II visant à combattre le dumping social et salarial pouvant découler de la libre circulation des personnes, ou encore dans la reconduction, à deux reprises, de l’Arrêté Bonny, lequel a permis de maintenir ou de créer plus de 20'000 emplois dans  les régions économiquement défavorisées et plus spécialement dans l’Arc jurassien.
     

  1. J’ajoute enfin que le métier de syndicaliste est exigeant et difficile, mais que je l’exerce depuis maintenant près de onze ans avec un plaisir toujours renouvelé. Or, même dans les situations les plus dures, la notion de plaisir a toujours été essentielle pour moi, et je ne suis pas sûr du tout de retrouver une satisfaction aussi intense en siégeant (éventuellement) au Gouvernement jurassien.
     

Confronté à un choix difficile, je pense, avec ces quelques réflexions, avoir répondu à toutes celles et à tous ceux qui ne comprennent pas pourquoi je ne me lance pas dans la course au Gouvernement jurassien. J’espère aussi avoir démontré qu’en renonçant à briguer un mandat ministériel, la défense de la classe ouvrière reste au cœur de mes convictions et de mes combats. Le même raisonnement s’applique évidemment à la promotion des intérêts jurassiens sur le plan fédéral.

Il va de soi que même si je me désiste à titre personnel, je m’engagerai à fond, lors de la campagne de cet automne, afin que le PSJ maintienne et si possible consolide ses positions au Gouvernement et au Parlement jurassiens. Dans cette perspective, je vous adresse, chères et chers camarades, mes fraternelles salutations socialistes.

Jean-Claude Rennwald

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Jean-Claude Rennwald - conseiller national
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