actutxt.jpg (3616 octets)
ligne.gif (1583 octets)

Fête du Travail, 1er mai 2001, La Chaux-de-Fonds, 14 h

Les syndicats, c’est branché !

Allocution de Jean-Claude Rennwald, vice-président de l’Union syndicale suisse (USS), membre du comité directeur du syndicat FTMH, conseiller national (PS/JU)

Chers collègues, Chers camarades, Chers amis,

Je suis très heureux d’être aujourd’hui parmi vous. D’abord parce qu’entre Jurassiens et gens des Montagnes neuchâteloises, nous partageons beaucoup de valeurs communes, notamment en matière de solidarité et d’ouverture. Ensuite parce qu’à travers mes activités syndicales dans le secteur de l’horlogerie, j’ai noué ici d’importantes relations syndicales, mais aussi de profonds liens d’amitié. Enfin parce que La Chaux-de-Fonds est une ville rouge et une citadelle de la résistance ouvrière.

Vous le savez, ce 1er mai 2001 est placé sous le slogan « Branchés, solidaires, syndiqués ». Et bien, je pense que ce slogan tombe à pic, car si l’on en croit certains néo-libéraux, les syndicalistes seraient des gens dépassés, des archaïques et des ringards. Comme le souligne le professeur américain Georges Ross : « Ce discours a un prix : sans les syndicats, le modèle social américain s’installerait partout. Et avec lui des individus toujours plus soumis aux diktats du marché, toujours plus vulnérables. »

Or, chers collègues, c’est précisément parce que nous ne voulons pas que le marché soit le maître absolu de cette planète, et parce que nous pensons que la solidarité est une valeur branchée, que nous travaillons et que nous militons au sein du mouvement syndical.

Certes, au cours du siècle écoulé, des progrès importants ont été accomplis : la durée du travail a diminué, le pouvoir d’achat s’est amélioré, l’espérance de vie s’est allongée, l’éducation et la santé sont devenus accessibles au plus grand nombre.

Ces progrès sont réels, mais cela ne m’empêche pas d’affirmer qu’aujourd’hui, nous avons autant de raisons de nous révolter que nos pères (mères) et que nos grands-pères (grands-mères). Oui, le combat social et syndical est aussi actuel qu’en 1936 ou qu’en 1968. Et cela, je ne le dis pas de façon théorique, mais parce que des faits très précis me montrent que nous vivons encore et toujours dans une société dominée par l’injustice sociale. En effet :

· Dans ce pays que l’on dit riche, un Suisse sur onze est considéré comme pauvre, un travailleur sur huit gagne moins de 3'000 francs par mois, et un travailleur sur deux gagne moins de 5'000 francs par mois.

· Dans ce pays qui est l’un des plus compétitifs de la planète, chaque salarié travaille en moyenne 2 heures de plus par semaine que les autres Européens.

· Dans ce pays parfois assimilé à un eldorado, les conditions de travail d’une partie des salariés deviennent toujours plus précaires, comme en témoigne la progression du travail intérimaire et des contrats à durée déterminée, sans parler du fait que les heures supplémentaires ne visent plus à faire face à des situations exceptionnelles, mais qu’elles forment aujourd’hui un système qui vise à détourner la durée légale ou conventionnelle du travail. La preuve, c’est que les heures supplémentaires sont pratiquement aussi nombreuses en période de récession qu’en période de boom économique.

· Dans ce pays où l’on a coutume de dire que la santé n’a pas de prix, les primes d’assurance maladie sont les plus antisociales d’Europe.

· Enfin, dans ce pays souvent comparé à une oasis de paix sociale, il devient toujours plus difficile de dialoguer avec certaines fractions du patronat, lesquelles rêvent d'un modèle social à l’américaine.

Ces exemples suffisent à démontrer que l’existence de syndicats, et si possible de syndicats forts, c’est quelque chose de branché. Mais alors, me direz-vous, dans ce marasme, que font les syndicats ? Comme aurait dit Georges Marchais, c’est une bonne question. Je ne suis pas venu ici pour me taper sur le ventre, et je suis le premier à admettre qu’au cours de l’histoire, les syndicats ont commis des erreurs. Mais je voudrais aussi rappeler un certain nombre de faits que l’on oublie trop souvent :

· Il y a en Suisse plus de 1'100 conventions collectives de travail. D’une manière ou d’une autre, toutes ces conventions ont amélioré les conditions de travail des salariés qui en bénéficient. Et bien, sans le mouvement syndical, aucune de ces conventions collectives n’existerait !

· Une nouvelle et importante convention collective vient d’être signé à La Poste. Et bien, sans le syndicat Communication, cette convention n’existerait pas.

· Les employés des CFF connaissent depuis quelque temps la semaine de 39 heures, qui a notamment permis d’assurer le maintien de 500 emplois menacés. Et bien, sans la SEV, le Syndicat des transports, cette brèche dans le mur des 40 heures n’aurait jamais pu être ouverte.

· L’année dernière, les employé-es de la blanchisserie Zeda, à Bâle, ont mené une grève qui leur a permis d’obtenir d’importantes améliorations salariales et d’en finir avec les salaires inférieurs à 3'000 francs. Et bien, sans le SIB, ce succès n’aurait jamais été possible.

· L’année dernière toujours, grâce à une intense mobilisation des travailleurs de l’entreprise, 125 licenciements ont été annulés à la Sapal, à Renens. Et bien, sans la FTMH, le sauvetage de ces emplois n’aurait pas eu lieu.

· Parce que nous sommes attachés à la défense du service public, nous avons récemment déposé le référendum contre la loi sur le marché de l’électricité (LME). Et bien, sans l’engagement du mouvement syndicat et plus particulièrement des syndicats SSP et FTMH, ce référendum n’aurait jamais abouti.

· Enfin, et pour nous tourner vers l’avenir, nous osons espérer qu’au début de l’année prochaine, les travailleuses et les travailleurs de l’horlogerie bénéficieront d’une convention collective encore améliorée, grâce à l’action de la FTMH.

Au-delà de ces exemples, une chose est claire : dans les secteurs où les syndicats sont forts, les conditions de travail et les salaires sont meilleurs que dans les branches sans syndicats. Ceux qui en douteraient n’ont qu’à comparer les salaires dans la construction, dans l’industrie des machines, dans l’horlogerie, à la Poste et aux CFF, avec les salaires pratiqués dans les secteurs du nettoyage, de la vente et de l’agriculture.

Les syndicats, j’en suis persuadé, sont capables de faire encore plus et beaucoup mieux. Mais pour cela, il est indispensable que les salariés rejoignent massivement les rangs des organisations syndicales. La nuit passée, j’ai fait un rêve. J’ai rêvé qu’en l’espace d’une année, chacun d’entre nous ferait au moins une nouvelle adhésion. Ainsi, d’ici au 1er mai 2002, nos effectifs auraient doublé. Je sais, c’est un peu simple, mais c’est souvent avec des vérités simples que l’on fait de grandes choses.

Sur ce terrain des adhésions et de l’engagement, nous devons nous inspirer de l’attitude exemplaire de nos collègues étrangers. Chaque année, à la FTMH, nous organisons une fête à l’intention des vingt meilleurs recruteurs du syndicat sur le plan national. Et bien, l’année dernière, parmi ces vingt meilleurs recruteurs, il y avait quinze collègues étrangers et cinq Suisses.

En me fondant sur une étude de Jean Steinauer et de Malik von Almen consacrée à l’apport de l’immigration au syndicalisme, j’ajoute que d’une certaine façon, nos collègues étrangers ont sauvé le syndicalisme suisse. Dans une chanson célèbre, la grande chanteuse québécoise Pauline Julien rêve d'un monde où il n’y aurait plus d’étranger. Pour ma part, je suis beaucoup plus modeste : je rêve d'un pays dans lequel les Suisses prendraient davantage exemple sur nos collègues de l’immigration dans le domaine du militantisme.

Cet engagement syndical de l’immigration constitue un argument supplémentaire pour conquérir et développer les droits politiques des étrangers. En l’espèce, je suis fier de rappeler que Neuchâtel et le Jura sont les deux cantons qui en ont fait le plus dans ce domaine.

Branché, solidaire, syndiqué : oui, le slogan choisi par l’USS pour ce 1er mai 2001 est plus actuel que jamais. Mais ce slogan est aussi un slogan d’avenir, car les batailles futures sont nombreuses. Au-delà des préoccupations et des négociations propres à chaque branche, nous devrons en effet nous mobiliser, ces prochains mois et ces prochaines années :

· Pour poursuivre la lutte contre les salaires au-dessous de 3'000 francs net par mois.

· Pour l’instauration d’une retraite à la carte dès 62 ans pour tous, et donc contre une 11e révision de l’AVS synonyme de relèvement de l’âge de la retraite et d’abaissement des prestations pour les petits et moyens revenus.

· Pour le maintien des emplois et d’un véritable service public dans le secteur de l’électricité.

· Pour les initiatives de l’USS en faveur de la diminution de la durée du travail à 36 heures par semaine et pour l’imposition des gains en capital. Des gains qui sont aujourd’hui plus importants que le revenu du travail, ce qui est un véritable scandale.

· Pour l’initiative en faveur des places d’apprentissage et de l’amélioration de la formation. Une initiative qui montre que le syndicalisme, c’est quelque chose de jeune et de branché.

· Pour une application cohérente et efficace des mesures qui visent à prévenir et à combattre le dumping social et la sous-enchère salariale que pourrait entraîner l’accord sur la libre circulation des personnes.

J’insiste sur ce dernier point, d’autant plus que nous sommes dans une région frontalière : nous ne tolérerons aucune entorse à l’application des mesures d’accompagnement relatives à la libre circulation des personnes. Il en va de la crédibilité des engagements que le Conseil fédéral et le patronat ont pris avant la votation du 21 mai 2000 sur les accords bilatéraux. Mais il en va aussi de la crédibilité du mouvement syndical. Une application réussie de ces mesures serait en outre le meilleur moyen de relancer la bataille pour l’adhésion à l’Union européenne et pour la construction d’une Europe sociale et politique.

Chers collègues et chers camarades, toutes les batailles que je viens de mentionner seront difficiles. Mais je suis aussi certain qu’avec un mouvement syndical fort et des syndicalistes branchés et solidaires, nous sommes capables d’en gagner beaucoup.

ligne.gif (1583 octets)
Jean-Claude Rennwald - conseiller national
Rue de la Quère 17 - CH - 2830 Courrendlin (JU)
Privé : Tél. + Fax. / ++41 (0) 32 435 50 30
Professionnel : Tél./ ++41 (0) 31 350 23 62 - Fax / ++41 (0) 31 350 22 22
E-mail : rennwald@bluewin.ch - Internet : http://www.rennwald.ch
home_dessin_mc.gif (24457 octets) Npowered_simple.gif (1406 octets)