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Demain, comment construire le socialisme

Orientation du travail politique du Groupe socialiste de l’Assemblée fédérale, 4. 5. 2001

Le socialisme n’est pas soluble dans le consensus permanent et inconditionnel, forme la plus élaborée de la domination sociale et politique

Contribution à la discussion de Jean-Claude Rennwald, conseiller national

« La création nationale fabrique du consensus, sans se soucier de l’histoire réelle. »  Benjamin Stora

Préambule

On trouvera dans les pages qui suivent quelques réflexions sur le thème « Orientation politique du travail du Groupe ». Comme on pourra le constater, j’ai suivi le canevas proposé, mais en changeant les intitulés des trois volets de cette discussion. Il m’apparaît en effet que la façon de poser certaines questions correspond déjà à un choix idéologique ou du moins à un parti pris quant à la suite des opérations. D’aucuns me rétorqueront sans doute que les questions posées relèvent de l’évidence, mais comme le dit si bien Pierre Bourdieu, il faut constamment se méfier du « piège des évidences ».

A) Les électrices et les électeurs du PS ? C’est qui ? Les prolos » ? Les « bobos » ? Ou bien les « prolos » et les « bobos » ?

Ce sous-titre, que l’on comprendra mieux après avoir terminé la lecture de ce passage, vise à élargir la méthode proposée, méthode selon laquelle il faudrait répondre d’emblée à la question « Sur quels thèmes le PS se profile clairement ? » En effet, avant de se profiler sur tel ou tel thème, il est capital de mener une réflexion sur les catégories et les couches sociales qui forment l’électorat potentiel du PS, ainsi que sur les transformations structurelles de cet électorat potentiel à travers le temps.

Voici quelques décennies, un certain marxisme vulgaire voulait nous faire croire que, dans les pays industrialisés, la classe ouvrière, au sens strict du terme, représentait l’immense majorité de la population active. Or, cela n’a jamais été le cas durant toute l’Histoire. Ce qui est vrai, en revanche, c’est que durant une longue période, la classe ouvrière a formé la majorité relative de cette même population active. Toutefois, en raison d’un certain nombre de problèmes socio-économiques structurels (déclin du secteur industriel, progression du tertiaire, développement des nouvelles technologies, etc.), les ouvriers, aujourd’hui, ne représentent plus cette majorité relative.

Le sociologue Robert Castel est d’avis qu’en France, le Front populaire de 1936 marque une étape décisive dans la reconnaissance de la classe ouvrière comme force sociale déterminante, capable d’imposer, grâce à ses actions collectives et à ses organisations, des conquêtes essentielles (congés payés, semaine de 40 heures, etc.). Mais dans les décennies suivantes, des années 1930 aux années 1970, on assiste à une sorte de « destitution » de position de la classe ouvrière en tant que principal fer de lance du monde salarial. Le même analyste décrit comme suit les principales transformations qui touchent le monde du travail durant cette période :

· Accroissement massif de la proportion des salariés dans la population active.

· Augmentation des salariés non ouvriers.

· Transformation considérable des structures internes du groupe des salariés non ouvriers. En 1930, la grande majorité de ces travailleuses et de ces travailleurs étaient des « petits » employés des secteurs public et privé. En 1975, en revanche, les « simples » employés représentent moins de la moitié des salariés non ouvriers, alors que la part des cadres moyens et des cadres supérieurs a fortement augmenté.

· Développement du tertiaire, parallèlement à la transformation de la structure sociale des entreprises, développement qui est aussi à l’origine de la prolifération d’un salariat non ouvrier : multiplication des services dans le commerce, les banques, les administrations des collectivités locales et de l’Etat (1).

A partir de cette évolution, que l’on a pu observer dans pratiquement tous les pays occidentaux, certains sociologues - ou prétendus tels - en ont conclu à la « disparition de la classe ouvrière », ce qui, sous leur plume, est souvent synonyme de justification du discours dominant sur la « disparition » des catégories sociales défavorisées et des inégalités sociales. Tout en étant fortement connotée idéologiquement, ce jugement est à la fois hâtif et erroné, et cela pour les raisons suivantes :

· La classe ouvrière, au sens classique du terme, existe encore.

· Ces dernières décennies, le salariat non ouvrier a explosé. Or, une partie non négligeable de ce salariat non ouvrier est dans une situation sociale et salariale plus difficile qu’une frange importante du monde ouvrier traditionnel. Le salaire d’un mécanicien de précision, par exemple, peut atteindre le double de celui d’une vendeuse.

· Dans la même logique, on a aussi assisté à l’expansion d’une sorte de « sous-prolétariat » (ouvriers agricoles, travailleuses et travailleurs de services de nettoyage et de distribution, travailleurs à statut précaire, etc.), expansion accompagnée d’une pression à la baisse sur les salaires et d’un brutal accroissement des inégalités au tournant des années 80/90, mais aussi d’une réorganisation du travail plus conforme aux intérêts du patronat: flexibilité accrue, développement du travail de nuit et du week-end, conventions collectives de travail (CCT) vidées de leur contenu, etc.

· Enfin, lorsque l’on sait qu’un travailleur sur huit gagne moins de 3'000 francs par mois, et qu’un travailleur sur deux gagne moins de 5'000 francs par mois, on se dit qu’en Suisse, les riches ne sont pas encore majoritaires.

Ce sont toutes ces catégories socio-économiques que je range sous l’étiquette « prolos ». Pour des raisons historiques et « naturelles », ce groupe social représente l’une des deux grandes composantes de l’électorat potentiel du PS, et le fait qu’environ un quart du salariat soit composé d’étrangers ne change pas la donne, d’autant plus qu’il est aussi de notre devoir de défendre et de promouvoir les droits politiques, sociaux, économiques et culturels de l’immigration.

Le développement massif d’un « salariat de cols blancs » est allé de pair avec l’émergence et la consolidation d’une « nouvelle classe moyenne » (ingénieurs, techniciens, enseignants, travailleurs sociaux et de la culture, etc.) Or, de nombreuses analyses et enquêtes le montrent, une partie importante de la « nouvelle classe moyenne », par ailleurs très active dans les nouveaux mouvements sociaux (écologistes, antinucléaires, féministes, pacifistes, tiers-mondistes, etc.) représente l’autre grande composante de l’électorat potentiel du PS. C’est ce groupe que nous appelons les « bobos », expression franco-française qui désigne des « bourgeois bohêmes libéraux et branchés ».

Selon Pascal Perrineau, directeur du Centre d’étude de la Vie politique française, la gauche, aujourd’hui, fait de plus en plus recette dans les couches bourgeoises du salariat : 20 % des cadres supérieurs votaient à gauche en 1973, 51 % ont fait de même en 1997. A son avis, c’est dans le poids des « bobos » que réside, lors des dernières élections municipales françaises, « la clef du succès du PS à Paris, Lyon ou Dijon, qui sont tout sauf des communes populaires » (2).

Mais le même Perrineau ajoute aussitôt : « Aujourd’hui, la gauche ne peut pas faire son deuil de la classe ouvrière, qui représente encore 28 % de la population active, sans se renier. » (3). D’ailleurs, lorsqu’elle sait comprendre les aspirations du monde du travail « classique » - les « prolos » - la gauche fait toujours de bons résultats. Raymond Forni (PS), président de l’Assemblée nationale, a ainsi été réélu maire de Delle (Territoire de Belfort), ville ouvrière par excellence, avec 72 % des voix au premier tour !

Tout cela pose naturellement un redoutable problème d’identité à la gauche en général et au PS en particulier, dans la mesure où les aspirations des deux grands groupes sociaux qui forment son électorat potentiel ne sont pas toujours les mêmes :

· Les « prolos » veulent avant tout des salaires décents, une sécurité sociale digne de ce nom, la garantie d’un emploi, bref, la sécurité matérielle.

· Les « bobos » ne se désintéressent pas de cette sécurité matérielle, mais elle leur est généralement plus facilement acquise qu’aux « prolos », raison pour laquelle ils font confiance au PS pour la défense d’autres valeurs : ouverture, tolérance, libération des mœurs, environnement de qualité, etc.

A mon avis, le PS commettrait une erreur historique et stratégique fatale s’il opposait les intérêts de ces deux groupes sociaux ou s’il privilégiait par trop l’un par rapport à l’autre. Personnellement, je ne vois par exemple aucune contradiction entre le fait de revendiquer une fiscalité plus juste pour les familles à revenu modeste et celui d’être favorable au mariage des homosexuels. Au début du siècle, un certain Lénine (pour qui, au demeurant, je n’ai pas une admiration débordante) avait d’ailleurs souligné que le succès d’une révolution résidait notamment dans la capacité de ceux « d’en bas » et de ceux « du milieu » à s’allier contre « ceux d’en haut ». Et n’oublions pas non plus que beaucoup de « bobos » sont des enfants de « prolos », ce qui n’a pas manqué d’imprégner leur culture politique et sociale.

B) Le PS veut-il toujours modifier les rapports de force ? Pourquoi n’y est-il pas encore parvenu?

Je ne suis pas opposé à des alliances ponctuelles avec le PDC (sur la défense des régions périphériques, par exemple) ou avec les radicaux (à propos de l’interruption de grossesse par exemple). Mais encore une fois, la question posée ne me semble pas être la bonne ou du moins pas la plus fondamentale.

Pour moi, la vraie question est la suivante : Le PS a-t-il encore l’ambition de changer les choses, de modifier les rapports de force, de prendre un jour le pouvoir en formant, par exemple, une coalition gouvernementale majoritaire avec d’autres forces progressistes (Verts, petits partis de gauche, secteurs « éclairés » de la bourgeoisie, etc.) ? Invité à un séminaire du groupe socialiste de l’Assemblée fédérale en février 1997 à Thoune, le politologue François Masnata avait posé le problème en ces termes : « Pourquoi depuis 1919 le PS n’a-t-il pratiquement plus augmenté son électorat ? Est-ce une preuve du succès de sa politique ? Avant d’ajouter : « Le parti ne se donne pas les moyens d’un discours de lutte. Il est devenu un parti de gestionnaire, fonctionnant dans la logique dominante de la Droite. Actuellement, être réaliste, c’est chercher à proposer un projet alternatif. » 

Le jugement est certes sévère. Il n’en reste pas moins que, sur le long terme, la dérive notabilaire est réelle, et que le PS stagne (dans la mesure où il n’arrive pas à franchir la barre de 25 % des suffrages) . Cette situation peut notamment être attribuée aux éléments suivants :

· La participation inconditionnelle du PS au Conseil fédéral (voir partie C).

· L’image, dans de larges secteurs de l’opinion, d’un gouvernement qui ressemble à un cartel, au sein duquel les principales forces politiques du pays se partagent les prébendes.

· Le renforcement de cette image durant les années de récession, dans la mesure où le Conseil fédéral et la majorité des politiques n’ont pas fait grand-chose pour combattre la crise économique.

· Parmi d’autres conséquences, comme l’attisement des sentiments xénophobes, ces éléments ont favorisé la montée du national-populisme blochérien et la percée de l’UDC au sein de la classe ouvrière et des milieux populaires en Suisse alémanique (A des degrés divers et selon des modalités qui diffèrent de cas en cas, des phénomènes de ce type sont aussi apparus en Autriche, en Italie du Nord, et encore davantage en Belgique avec le Vlams Block). Dans une certaine mesure, Blocher met aussi les trois autres forces gouvernementales dans le même panier, reprenant en quelque sorte le discours de Jean-Marie Le Pen, leader du Front national en France, sur la « bande des quatre » (RPR, UDF, PS et PC). Et l’on assiste grosso modo aux mêmes effets des deux côtés de la frontière franco-suisse. Déjà cité, le politologue Pascal Perrineau note que dans les années 70 et 80 (les années « programme commun »), les ouvriers français votaient massivement à gauche, à 75 %, par exemple, aux législatives de 1978. Mais tout se dérègle au début des années 90. En 1993, 42 % seulement des ouvriers votent à gauche. Même en 1997, où Jospin est porté au pouvoir, seule une courte majorité d’ouvriers, 55 %, vote à gauche. Et à la question de savoir si ce décollage s’est effectué principalement au profit du Front national, Pascal Perrineau répond : « Exact. C’est ce que j’ai appelé le gaucho-lépenisme. A l’élection de 1995, Le Pen est, de loin, le premier candidat chez les ouvriers. Dans les années 90, plus on est au cœur de la classe ouvrière, plus on vote Le Pen. » (4). Il faut ajouter que, pour l’essentiel, ce basculement du monde ouvrier s’est fait sur les thèmes suivants : immigration, insécurité, chômage, effets de la mondialisation. Cette situation présente une certaine analogie avec ce qui se passe en Suisse, et plus particulièrement en Suisse alémanique. Alexandre Mariéthoz (5) a clairement montré que dans les cantons d’Argovie, de Berne et de Zurich, l’électorat du PS est à 67.6 % composé de représentants des classes moyennes, alors que 28 % des ouvriers non qualifiés et 30 % des qualifiés votent pour le PS. Dans ces cantons toujours, hormis les agriculteurs, ce sont les ouvriers non qualifiés (54 %) et les travailleurs qualifiés (un tiers) qui votent pour la droite dure, UDC en tête. A l’inverse, dans les cantons de Vaud et de Genève, 70 % des citoyennes et des citoyens qui appartiennent à l’électorat populaire restent fidèles au PS et à la gauche. Le même Mariéthoz ajoute toutefois qu’à l’occasion des élections fédérales de 1999, une évolution semblable s’est aussi dessinée en Suisse romande : « J’ai quand même été surpris que le phénomène touche à ce point la Suisse romande, où le PS, bien implanté dans la classe moyenne, peut aussi compter sur un électorat plus populaire. L’asile et la politique des étrangers n’y sont pas au hit-parade des préoccupations et le terreau anti-européen n’y est pas très fertile. De plus, ce sont d’habitude l’extrême gauche et le PS qui recueillent les votes protestataires. Le cas de Genève est intéressant. L’UDC a progressé surtout dans les quartiers populaires, comme les Avanchets. Et le PS a plus souffert de l’exode des bas salaires que la gauche dure. » (6). Même s’il n’y a pas un lien direct entre les deux choses, on peut noter au passage que si, lors des élections cantonales neuchâteloises du printemps 2001, la gauche a progressé de deux sièges au Grand Conseil, le PSN, qui a une image très gouvernementale, en a perdu deux, alors que les petits partis de gauche en ont gagné quatre. Quant à l’extrême gauche française, elle a réalisé des scores oscillant entre 7 et 9 % dans une centaine de villes à l’occasion des dernières élections municipales, et cela dans un pays où le PS est considérés comme l’un des plus à gauche d’Europe !

· Le fait qu’à certaines occasions, le PS a par trop privilégié son électorat « bobos » par rapport à ses électeurs « prolos ». Cela est clairement apparu (et nous en payons encore aujourd’hui le prix) à l’occasion de la 10e révision de l’AVS. En effet, en soutenant ce projet, le PS s’est rangé derrière ses couches « modernistes », qui privilégiaient les avantages de la 10e révision (rente individuelle, bonus éducatif et de prise en charge), alors que l’aile syndicale et ouvrière, mais aussi les éléments plus combatifs d’autres catégories sociales, ne voulaient pas cautionner une réforme synonyme d’élévation de l’âge de la retraite des femmes.

·. Le fait qu’au sein du PS, et surtout au sein du groupe parlementaire, un courant colle de plus en plus à l’idéologie socialo-libérale. On l’a notamment vu à l’occasion des débats concernant la loi sur le marché de l’électricité (LME), mais aussi lors de discussions relatives à d’autres domaines du service public : CFF, Poste ou Swisscom. Or, et même si j’admets que des réformes sont nécessaires, ce courant fait fausse route, car sa politique va à l’encontre des intérêts des usagers, des travailleurs employés dans ces secteurs et des régions périphériques. L’exemple de l’Angleterre devrait, pourtant, servir de leçon. Ignacio Ramonet, rédacteur en chef du «Monde diplomatique », émet quelques considérations fort intéressantes à propos de la politique d’Anthony Blair : « Sa troisième voie social-démocrate reste perçue comme une simple variante du néolibéralisme de Mme Thatcher. Sous son mandat, la part des dépenses publiques dans le produit intérieur brut est la plus basse depuis quarante ans. L’Angleterre présente les plus violents contrastes sociaux d’Europe. La discrète privatisation de l’éducation publique s’est poursuivie. M. Blair a imposé des frais d’inscription élevés à l’université qui ont introduit une sélection par l’argent. Sur le plan des soins médicaux, une enquête de l’OMS place le Royaume-Uni en queue de l’Union européenne. Les inégalités entre les plus riches et les plus pauvres ont augmenté. Plus de cinq millions de Britanniques se trouvent dans un état de pauvreté absolue. Près de la moitié des femmes sont salariées à temps partiel. Un quart des enfants vit au-dessous du seuil de pauvreté. La Grande-Bretagne compte le plus d’enfants pauvres de tous les pays industrialisés. » (7). Est-ce sur ce chemin que veulent nous emmener les « modernistes » du PSS ?

C) Participation au Conseil fédéral : consensus ou caution de la domination de classe ?

Il n’est pas inutile de rappeler que ce qu’il est convenu d’appeler le « consensus helvétique » repose sur deux piliers essentiels : d’une part l’accord de Paix du travail signé en 1937 (deux conventions collectives de travail sont signées cette année-là, l’une dans l’horlogerie, l’autre dans les machines) qui vise à privilégier la négociation et la concertation entre syndicats ouvriers et organisations patronales par rapport aux mesures de luttes ; d’autre part la « formule magique » du Conseil fédéral, en vigueur depuis 1959, et qui associe toutes les grandes forces politiques du pays (UDC, PRD, PDC et PSS) à la gestion des affaires gouvernementales. A ces deux éléments centraux, il convient d’en ajouter une troisième, à savoir la coopération régulière entre l’Etat et les groupes d’intérêt.

On se concentrera ici sur la question de la « formule magique », en soulignant tout d’abord que depuis la dernière guerre, la Suisse a, en quelque sorte, supprimé la notion d’opposition politique organisée de manière structurelle et permanente. (Ces précisions visent à tenir compte des oppositions qui se manifestent à travers les référendums et les initiatives populaires). En 1943, un premier socialiste est entré au Conseil fédéral. Il y restera jusqu’en 1953. Après une absence socialiste de six ans, on en arrive, dès 1959, à la « formule magique ».

Le changement intervenu en 1959 fait suite à d’autres modifications dans la composition du bloc au pouvoir. Elles correspondent toutes à des transformations importantes du poids relatif des clivages politiques fondamentaux au sein de la société helvétique :

· Au moment de la constitution de la Suisse moderne symbolisée par la Constitution radicale de 1848, le clivage entre centralistes et défenseurs des « périphéries » catholiques domine, tout en se superposant à d’autres clivages : anticléricaux contre cléricaux ; partisan d’un Etat central assez puissant permettant de créer un marché national contre représentants des cantons à vocation particulièrement agricole. C’est le règne du monopole radical.

· Avec le développement de l’industrialisation, ces affrontements sont partiellement relégués à l’arrière-plan, et le clivage possédants-travailleurs occupe, peu à peu, le devant de la scène. Cette évolution favorise l’entrée des conservateurs au Conseil fédéral (et temporairement celle des libéraux), conservateurs qui ont désormais des intérêts communs avec les radicaux face aux organisations du mouvement ouvrier.

· Le développement industriel et l’urbanisation contribuent à renforcer les divergences au sein du radicalisme suisse. Ce processus favorise la naissance du Parti artisans et paysans (PAB), conséquence des divergences d’intérêt entre la grande bourgeoisie et une partie des « couches moyennes », mais aussi du clivage ville-campagne. Solidarité de classe et nécessité de ne pas s’aliéner une partie importante de la paysannerie aidant, le PAB ne tardera pas à être intégré au bloc au pouvoir.

· Enfin, ce sont essentiellement l’atténuation (à ne pas confondre avec sa disparition) du clivage de classe, la paix du travail et l’adhésion des socialistes au principe de la défense nationale qui ont favorisé l’intégration du PSS au sein des forces qui participent à la gestion du pays et qui composent le bloc au pouvoir.

La participation socialiste au Conseil fédéral n’est donc pas un phénomène tombé du ciel, mais le résultat d’un long processus socio-historique qui a conduit à intégrer au sein du bloc au pouvoir l’ensemble des « minorités » significatives du pays.

Sur la base de cette évolution, le politologue François Masnata assimile la Suisse à une « société élitaire à base corporative » (8), dans laquelle il discerne les prémices d’une Suisse « en marche vers le totalitarisme », dans le sens où il n’existe pas de véritable opposition dans notre pays. Le propos est excessif, mais il n’est pas totalement dénué de pertinence, comme nous allons le voir en examinant les avantages et les inconvénients de la participation socialiste au Conseil fédéral.

Le système de gouvernement fondé sur la participation de quatre grandes forces (dont le PS), ainsi que sur le principe de la collégialité, a fonctionné sans trop de grosses difficultés tant que la croissance économique permettait à l’Etat central d’assumer sa fonction de redistribution des richesses, de faire progresser les revenus et les conditions sociales des catégories les plus faibles. Durant une assez longue période, qui correspond grosso modo à la deuxième partie des « Trente Glorieuses » (1945-1975), le « consensus » n’a donc pas uniquement servi les dominants, il a aussi profité aux dominés : les assurances sociales ont ainsi connu leur développement le plus intense durant la période où ce « consensus » était le plus fort.

Or, tout le monde ou presque sait que ce système fonctionne beaucoup moins bien depuis le milieu des années septante, avec des hauts et des bas bien sûr. Comme le souligne le politologue Daniel-Louis Seiler, des ruptures sont progressivement apparues : « Depuis 1979, le système semble grippé. Si la formule magique demeure inchangée, elle ne cesse de subir des revers, aussi bien au Parlement que devant le peuple. Au Parlement, l’axe des majorités d’idées s’est déplacé du centre-gauche vers le centre-droit, trahissant l’évolution des rapports de force au sein de la démocratie-chrétienne (…) Indice d’une évolution que le Parlement ne fait que refléter, les projets du Conseil fédéral sont désavoués par le corps électoral. » (9). 

A plusieurs reprises, en particulier lors du congrès du 12 février 1984, une fraction non négligeable du PS a plaidé en faveur d’un retrait du Conseil fédéral. Ce jour-là, c’est à une assez faible majorité – 733 voix contre 511 – que les socialistes ont décidé de rester au Conseil fédéral. Il est vrai que ce congrès s’était déroulé dans des conditions particulières, puisqu’il faisait suite à la non-élection de Lilian Uchtenhagen, candidate officielle du parti au Conseil fédéral. Le 7 décembre 1983, la majorité bourgeoise des Chambres lui avait préféré un homme, Otto Stich, considéré comme plus modéré.

Au-delà des débats provoqués, du moins partiellement, par des événements ponctuels et des réactions de type émotionnel, il convient de s’interroger sur ce que plus de quarante ans de présence socialiste au Conseil fédéral ont apporté à ceux que le PSS est censé représenter, à savoir les « prolos » et les « bobos ». Le bilan de cette participation est très contrasté.

A l’actif, on peut mettre en exergue :

· L’influence qu’exerce le PSS dans des domaines importants pour le monde du travail et les catégories les plus défavorisées (AVS, assurances sociales, santé, transports publics) ;

· La mine d’informations que représente le gouvernement central et son administration.

· Le fait d’être associé au choix des grands commis de l’Etat. Sur ce dernier point, il convient toutefois de relativiser. En effet, une étude sérieuse montre qu’à la fin des années quatre-vingts (les données n’ont pas fondamentalement changé depuis), on recensait, sur les 120 plus hauts fonctionnaires de la Confédération, 47.7 % de radicaux, 21.6 % de démocrates-chrétiens, 6.3 % de démocrates du centre, 6.3 % de libéraux, 5.4 % de socialistes et 12.7 % rangés sous l’étiquette « autres » (10). La distorsion est encore plus forte dans les commissions d’experts extra-parlementaires, où l’on compte, pour ne prendre que l’exemple des groupes d’intérêt, 26 % de représentants de l’économie privé, contre 3.6 % du mouvement syndical et 1.4 % des organisations de consommateurs ! (11). Enfin, si l’on élargit la problématique à l’ensemble de l’élite politique, le constat est tout aussi criant. Dans sa célèbre étude sur les processus et les structures de décision en Suisse, Hanspeter Kriesi a défini, pour la période comprise entre 1971 et 1976, les 27 personnalités les plus influentes du pays. Or, la majorité de ces 27 personnes présente le profil suivant : homme, moins de 50 ans, officier, juriste, membre du Parti radical (12).

Au passif, on mentionnera :

· La démobilisation des milieux populaires et un abstentionnisme croissant dans les couches sociales défavorisées.

· Un recul du militantisme, comme en témoigne, par exemple, la difficulté à recueillir des signatures pour les initiatives lancées ou soutenues par le PS.

· L’absence d’une véritable opposition politique de gauche et d’un réel projet politique alternatif en Suisse.

· Une politique de compromis qui confine parfois à la compromission, et qui entraîne surtout une grande confusion politique, du fait de la collégialité. En effet, sur passablement de problèmes (armée, assurances sociales, législation du travail, Europe), en particulier lorsque ceux-ci font l’objet d’une votation populaire, les conseillers fédéraux socialistes doivent défendre des positions contraires à celles de leur parti. Cette opposition pose un sérieux problème de visibilité politique, en particulier lorsque les ministres socialistes en arrivent à se « défoncer » pour défendre le point de vue du collège gouvernemental, ou lorsque dès le départ du processus de décision, ils doivent défendre des projets qui ont déjà une sérieuse coloration très droitière (11e révision de l’AVS ou certains dossiers concernant le service public, par exemple).

· Le fait que quelques socialistes, qui occupent des postes de hauts fonctionnaires ou de dirigeants d’entreprises fédérales, défendent, sur des points importants, une position qui n’est pas celle du PS. C’est notamment le cas à La Poste, aux CFF et à l’Office fédéral du personnel, et ce malaise s’est encore accentué avec « l’affaire des hauts salaires ».

· Une perte de crédibilité due au fait qu’à plusieurs reprises, la majorité bourgeoise du Parlement n’a pas voulu élire le candidat (ou la candidate) présenté officiellement par le PSS (Walter Bringolf en 1959, Arthur Schmid en 1973, Liliane Uchtenhagen en 1983, Christiane Brunner en 1993). Depuis lors, le groupe parlementaire socialiste a pris l’option de présenter deux candidats (Moritz Leuenberger et Otto Piller en 1995) pour ne pas perdre la face. Dans quelque temps, cette méthode pourrait aussi ne plus être suffisante.

A titre de « divertissement » pour le lecteur, on notera que la problématique examinée ici ne concerne pas que la Suisse. D’une certaine manière, en effet, Lionel Jospin est victime de la cohabitation, au même titre que le PSS l’est de sa participation au Conseil fédéral. C’est du moins ce qui se dégage de ces quelques remarques de Jean-Marie Colombani, directeur du « Monde », à propos des récentes difficultés du Premier ministre français : « Le fait que son bilan ne soit pas immédiatement convertible en suffrages renvoie à un déficit proprement politique : ce bilan pèse peu, en effet, face à la dynamique de la cohabitation. Et cela d’autant plus que l’actuelle, la plus longue de notre histoire, contribue à banaliser la gauche dans l’univers du pouvoir et, donc, par un effet de perspective plus que de réalité, à effacer sa différence avec la droite. Ces vingt dernières années, depuis 1981, la gauche aura été aux affaires – à l’Elysée, à Matignon, ou encore les deux à la fois – dix-huit ans, la droite n’ayant gouverné sans partage que pendant deux ans, de 1995 à 1997. Le pouvoir, son image, son bilan, son usure sont donc le fardeau de la gauche, autant sinon plus que de la droite. » (13).

 

A partir de l’analyse que nous avons esquissée, il m’apparaît que quatre solutions s’offrent aujourd’hui au PSS s’agissant de sa participation au Conseil fédéral :

  1. Poursuivre sur la ligne actuelle, synonyme de confusion et d’un manque de visibilité politique toujours plus important, lequel pourrait avoir des effets très négatifs à l’occasion de futures échéances électorales, notamment en 2003.

  2. Envisager une coalition gouvernementale avec les Verts, le PRD et le PDC (et donc sans l’UDC), au moyen d’une élection sur une liste bloquée et sur la base d’un programme politique minimum, axé en particulier sur le social et sur l’Europe. Vu le glissement à droite du PRD et du PDC, les chances d’un tel projet paraissent minces, mais il faut tout de même explorer cette piste.

  1. Exiger des conseillers fédéraux socialistes (ainsi que des futurs candidats) qu’ils s’engagent, sur quelques questions essentielles pour le PS (la sécurité sociale, le service public, l’Europe), à se distancer clairement, ouvertement et publiquement de la majorité bourgeoise du gouvernement. (Pascal Couchepin s’adonner assez régulièrement à cet exercice, et il a bien raison. Pourquoi les ministres socialistes ne pourraient-ils pas en faire autant ?).

  2. Quitter le Conseil fédéral et pratiquer une politique d’opposition musclée, laquelle demanderait un investissement considérable en temps, en énergie (en raison notamment de la nécessité d’avoir très souvent recours à l’arme du référendum ou de l’initiative) et en créativité politique.

D) Que faire ?

A ce stade du débat au sein du groupe parlementaire, je ne tiens pas à développer trop longuement ce point, car de mon point de vue, il est difficile de proposer toute une série de solutions s’il n’y a pas un minimum d’accord sur l’analyse. J’aimerais toutefois suggérer quelques pistes :

· L’électorat potentiel du PS comprend à la fois des « prolos » et des « bobos ». Le PS ne peut pas privilégier l’un de ces deux groupes par rapport à l’autre.

· Le choix des thèmes sur lesquels le PS entend se profiler doit tenir compte de cette donnée essentielle. Autrement dit, il faut avancer aussi bien sur des sujets relatifs à la sécurité matérielle et sociale (AVS, assurance maladie, etc.), qui est le terrain de prédilection des « prolos », que sur des thèmes plus qualitatifs (environnement, formation, mœurs, etc.) et d’ouverture (mondialisation, ONU, Europe), lesquels intéressent davantage les « bobos ».

· La question européenne doit rester centrale pour le PS, car s’il quitte ce terrain, plus personne ne l’occupera. L’Europe reste en un instrument de re-régulation, le principal rempart face aux excès de la mondialisation (laquelle laisse tout de même une marge de manœuvre relativement importante aux Etats, ne l’oublions pas) et, ouvre, malgré ses imperfections et ses dérives néo-libérales dans certains secteurs, des perspectives sociales intéressantes.

· Dans les années à venir, la question de la défense du service public (ce qui n’empêche pas sa modernisation) sera centrale. A certains égards, c’est une chance pour le PS, car la défense d’un service public de qualité peut être un thème rassembleur pour les «prolos » et les « bobos »

· De mon point de vue, la question sociale, les services publics et l’Europe doivent donc rester les principaux thèmes de réflexion et d’action du PS, même si je suis bien conscient que dans les deux ans à venir, l’adhésion à l’ONU sera également un sujet central en matière de politique extérieure. 

· Pour ses militants, ses membres et ses électeurs, le PS doit avoir une meilleure visibilité politique, ce qui suppose l’abandon d’une politique de consensus permanent et inconditionnel, qui est souvent la forme la plus élaborée de la domination sociale et politique.

· Cela implique notamment une clarification sérieuse de la position du PS quant à sa participation au Conseil fédéral. Parmi les possibilités offertes ci-dessus, le choix devra se faire, selon les circonstances, entre les variantes 2, 3 (variantes moyennes) et 4 (variante forte).

Quelques précisions et informations encore pour tenter de convaincre ceux qui, à ce stade de la lecture, ne le seraient pas encore :

· Le monde du travail « classique » n’a plus le même poids que voici quelques décennies, c’est vrai. Il n’en demeure pas moins que dans un passé récent, la gauche politique et syndicale a enregistré deux succès sur ces thèmes : rejet de la loi sur le travail en 1996, rejet de l’AFU sur le financement de l’assurance-chômage en 1997. Et il faudra relancer des référendums sur de tels sujets si cela s’avère nécessaire !

·  Sous la pression de l’UDC, le PDC et le PRD virent toujours plus à droite. Pour le PS, c’est une raison supplémentaire de se positionner clairement à gauche. Un recentrage du PSS aurait en effet pour conséquence de pousser encore davantage de « prolos » - voire aussi une partie des « bobos » - dans le camp de l’abstentionnisme ou du populisme blochérien.

· D’aucuns objecteront que les socialistes romands, considérés comme plus à gauche, ont moins progressé que leurs camarades alémaniques lors des dernières élections fédérales. Certes, mais il faut savoir d’où l’on part, et tenir compte du fait qu’en Suisse romande, les forces politiques situées à gauche du PS jouent encore un rôle relativement important. Si l’on tient par exemple compte des suffrages obtenus par l’ensemble des forces de gauche lors des dernières élections au Conseil national, on constate que parmi les huit premiers du classement, il y a cinq cantons romands (14). En outre, quatre des six sièges socialistes au Conseil des Etats sont occupés par des Romands, et dans la plupart des cas, ces victoires ont été possible grâce à l’unité des forces de gauche. Enfin, l’impact d’un parti ne se mesure pas qu’à travers les élections. Sous réserve des résultats d’une étude empirique que j’ai initiée, j’émets ainsi l’hypothèse que les mots d’ordre du PSS relatifs aux votations fédérales sont mieux suivis dans la majorité des cantons romands que dans la majorité des cantons alémaniques, ce qui va aussi de pair avec un taux de syndicalisation plus élevé en Suisse romande.

·  Le renforcement de la visibilité politique du PS dépendra aussi de sa capacité à s’allier aux autres forces de gauche (à la fois proches des « prolos » et des « bobos »), aux syndicats (plutôt « prolos ») et aux nouveaux mouvements sociaux (plutôt « bobos »), et à créer ainsi une dynamique.

· Il convient enfin de lancer quelques idées audacieuses et originales, quelques idées qui sortent des chemins battus et que l’on peut considérer comme des « utopies réalistes » (idée utopique aujourd’hui, mais réaliste à moyen et à long terme). Parmi celles-ci, je mentionnerai la semaine de 4 jours, susceptible d’intéresser aussi bien les « prolos » (ce que confirme une enquête FTMH dans l’industrie horlogère) que les « bobos ». Ce projet pourrait en outre être l’un des moteurs de la construction de l’Europe sociale, comme le souligne Pierre Larrouturou,, président de l’association « Nouvel Equilibre-4 jours » : « De même que l’Europe s’est construit sur une idée simple, mise en place d’abord dans un ou deux pays, l’Europe sociale ne se construira que si un pays est capable d’innover vraiment. La semaine de 4 jours (en France) peut être la clé de l’Europe sociale. » (15). La semaine de 4 jours, elle aussi, peut rassembler les « prolos » et les « bobos », car la semaine de 4 jours, c’est tout à la fois du temps supplémentaire pour se reposer, pour ses loisirs, pour les activités culturelles, pour se former, pour partager mieux et davantage au sein du couple.

Une fois encore, je fais un petit détour par la France, en citant à nouveau Jean-Marie Colombani, directeur du « Monde » : « Le politique Lionel Jospin n’a plus le choix : il lui faut réinventer la gauche, sa différence et son projet. Ce qui signifie, même s’il ne le dit pas, être candidat et se battre. » (16). Et bien, camarades, réinventons et battons-nous ! Car comme on pouvait le lire sur un graffiti de Mai 68 : « L’ennui est contre-révolutionnaire ». (17).

Jean-Claude Rennwald, avril 2001.

Notes

1) Robert Castel (1995), La métamorphose de la question sociale. Une chronique du salariat, Paris, Fayard, pp. 351-363.

2) Le Nouvel Observateur, 5 avril 2001, p. 60.

3) Ibid.

4) Ibid.

5) Alexandre Mariéthoz (1999(), Radiographie de l’électorat du Parti socialiste suisse, Université de Genève, Département de science politique, 49 p.

6) L’Hebdo, 4 septembre 1999.

7) Le Monde diplomatique, avril 2001, p. 1.

8) François et Claire Masnata-Rubattel (1991), Le pouvoir suisse 1291-1991. Lausanne, Editions de l’Aire, p. 254.

9) Daniel-Louis Seiler (1987), « Enjeux et partis politiques en Suisse », Revue Pouvoirs, No 43, p. 136.

10) Paolo Urio, Forschungsbericht über dies schweizerische Chefbamten, cité dans Bilanz, No 2, 1983, p. 58.

11) Rudolf H. Strahm (1987), Wirtschatfsbuchschweiz, Zurich, Ex Libris, 301 p.

12) Hanspeter Kriesi (1980), Entscheidungsstrukturen und Entscheidungsprozesse in der Schweizer Politik, Frankfurt/New York, Campus Verlag, 782 p.

13) Le Monde, 18 avril 2001, p. 17.

14) Jean-Claude Rennwald (2000), Quand la Suisse éclatera, Courrendlin, Editions CJE, p. 60.

15) Pierre Larrouturou (1998), 35 heures : le double piège, Paris, Belfond, p. 233.

16) Le Monde, 17 avril 2001, p. 17

17) Cité dans Jean-Claude Rennwald, 1998, Vive la politique, Courrendlin, Editions CJE, pp. 308-309.

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